• Trempe d'Airin

    Voilà ! Comme promis, un petit article sur l'histoire des invasions de l'Irlande. Je me base sur ce contexte pour écrire Demi-Deuil et Coeur de Cendre, dans une certaine mesure, cela va de soit. Mais je suis surtout fichtrement intéressé par tout ce qui touche à cette époque.

    Introductionnage :

    l'Irlande

    1- l'Irlande


    L'Irlande, la verte Erin, est un coin réputé pour ses prairies vertes, ses troupeaux de mouton et sa bière d'excellence qui ravit nos papilles. Mais c'est aussi et surtout une terre de légende et d'histoire, berceau d'une grande partie de la mythologie Celte qui ravit nos esprits rêveurs. Face à tant de ravissement, il était temps de lui consacrer un petit article.

    L'histoire mythique des invasions de l'Irlande est un sujet un brin brumeux puisqu'il se perd dans un lointain passé de traditions orales. De bouche chevrotante en oreille naïve, les récits ont largement eu l'occasion d'être déformés et amplifiés. Il est d'ailleurs assez instructif de noter les descriptions qui sont faites des différents peuples. En général, les malheureux vaincus ont des apparences monstrueuses, tout au bénéfice de leurs beaux et fiers conquérants. Et oui, quand on perd, on raconte pas sa vie. Ou dit d'une autre manière : le monde se divise en deux catégories, ceux qui se font mousser et ceux qui leurs frottent le dos. Mais trêve de causticités, il y a quand même de beaux exemples de fair play qui, revus à la sauce Hollywood, feraient verser des larmes aux plus endurcis.

    Revenons donc à nos moutons irlandais. Les paroles s'envolent et les écrits restent. Pour ces derniers, on retient communément deux ouvrages de références datés respectivement du IXième et XIième siècle. Il s'agit des incontournables Lebor Gabála Érenn et Caith Maige Tureedh dont les noms éloquents éclairent tout de suite le lecteur avisé. Néanmoins, ô lecteur un peu moins avisé, si  comme moi, tu ne parle pas couramment le gaélique, on peut s'en tenir aux traductions françaises : le Livre des Invasions de l'Irlande et le Récit de Mag Tuired.

    charge danéenne

    2- La Seconde Bataille de Mag Tuired


    J'ai cependant dû les contourner. La langue m'est inconnue, je ne les ai pas sous la main et enfin, c'est sans doute un peu long à lire. Trois de mes cinq sens me faisant défaut je resterai finalement modeste dans mes ambitions. Cet article ne sera donc pas transcendant (j'en suis navré) mais donnera plutôt une vue d'ensemble saupoudrée de détails plus ou moins croustillants.

    Après plusieurs cogitations intenses, j'ai tout bonnement choisi d'opter pour une architecture simple suivant la chronologie. Les vieux trucs restent les meilleurs trucs, mais en fait, l'histoire des peuples qui se sont étripés en Irlande peut facilement, à leur image, être débitée en tranches.
    On dénombre six vagues d'invasions qui se sont succédées, avec leurs gloires et leurs méfaits. Je procèderai tout simplement dans l'ordre, en traitant tout d'abord des trois premières d'un coup, puis de la quatrième, la cinquième et pour finir, sans surprise pour le lecteur avisé, par la sixième.

    Ces parties auront cependant des tailles assez différentes, en fonction des événements qui s'y déroulent. Par ailleurs, comme il s'agit d'un passé lointaine où l'histoire et la légende se chevauchent allègrement, j'ai parfois des sources contradictoires. C'est pourquoi je m'efforcerai de toujours resituer mes déclarations par rapport à leur provenance.
    Enfin, pour les images, j'ai glané quelques photos sur le web et d'autres dans des livres, si par hazard l'auteur d'une de ces illustrations passait par là, je le remercie par avance de sa collaboration non-intentionnelle à cet article et l'assure que je ne gagne rien avec ce travail...d'ailleurs, toutes les sources peuvent être trouvées à la fin de cet exposé.

    Voilà, j'espère que ce petit exposé saura vous charmer et je vous souhaite bonne lecture !

    Plan :
    1- Les Skas de Nemed : les premières invasions
    2- Les Hommes-foudre
    3- Les Tuathas dé Danann
    4- Les Soldats Espagnols
    Conclusionation
    Bibliographie et Imagerie

  • Pourquoi regrouper trois invasions en une partie quand les suivantes ont chacune le droit au chapitre ? En réalité, il n'y a pas grand-chose à dire des deux premières. Les histoires sont si anciennes qu'elle ont acquis cette patine propre aux légendes primordiales où l'on ne sait plus exactement ce qui est possible et ce qui ne l'est pas. Dans notre cas, les quelques références que j'ai pu glaner parlent de l'Arche de Noé, de faucon vivant 5500 ans et de peuplades étranges (R Willis et al, 1993). Inutile de dire que ça ne date pas d'hier.

    Plus intéressante et plus consistante est l'arrivée d'une flottille de bateaux plats aux voiles carrées. C'est une époque rude et les peuples errants sont rarement pacifiques. Cette bande rendue farouche par l'adversité débarque en Irlande avec à leur tête, Nemed qui donnera leur nom : les Némédiens.
    Ils venaient de Scandinavie, après avoir étés successivement chassés du Danemark puis de la Norvège. A cette époque bien sûr, on ne les appelait pas encore ainsi. Jack Vance, dans son glossaire annexé au cycle de Lyonnesse évoque les Skas, peuple noble et conservateur qui aurait gardé la même langue depuis la nuit des temps. De fait, ils étaient capables de comprendre les textes les plus anciens sans plisser les yeux pendant des heures sur des traductions incertaines. Voilà qui fait penser aux islandais actuels, à croire que c'est un trait nordique.
    Ces braves guerriers se considéraient comme la seule race véritablement humaine, ce qui explique leur renfermement et, forcément, l'hostilité que pouvait manifester leurs voisins. En l'occurrence, au Danemark, ils étaient en conflit avec les Ur-goths qui seront à l'origine de nombreux peuples Goths, dont les bien connus Vikings.

    Carte expansion des Skas

    3- En rose, les territoires colonisés par les scandinaves


    Chassés de leurs terres, les Skas s'installent en Irlande où il ne s'est pas encore passé grand-chose jusque là. Les choses vont changer. Il attirent immédiatement l'attention des belliqueux Fomoriens, lesquels vivent dans les îles non lointaines (Willis 93)…à moins que ce ne soit la froide et humide Ecosse (E Brasey, 2007)  ou encore le royaume légendaire d'Ufland du Nord autrement nommée Fomoirie (J Vance, 1983). On retiendra qu'il s'agit d'un peuple disséminé sur un vaste territoire insulaire.
    Les Fomoriens sont décrits de bien des manières…mais jamais élogieuses, ce qui positionne d'emblée leur popularité dans les pages de l'Histoire. Le thème de l'asymétrie revient souvent dans les récits : Colosses unijambistes et manchots maudits par les dieux (Willis 93), cyclopes redoutables (Brasey 07) ou carrément des monstres aux formes variées (K Van Tulleken 1985), les écrits s'accordent sur leur maîtrise des arts magiques, de la navigation et de la guerre (ce qui discrédite un peu ces histoires de manchots). On sait cependant que "fomhor" signifie "géant" en celtique et ils devaient apparaître ainsi à leurs (nombreux) ennemis : terrifiants et imposants.
    Après la mort de leur roi Nemed dans la bataille qui précipite leur asservissement, les Némédiens se voient imposer un joug cruel qui les condamne à verser chaque année une proportion conséquente de leur bétail et récolte. Ces graines de tempête finissent par germer : ils se révoltent le jour de la fête de Samhain, le 1er Novembre.

    Donegal

    4- La plaine de Donegal


    Le combat est acharné, la plaine de Donegal est bientôt gorgée des sangs mêlés des deux camps. Par deux fois, les révoltés parviennent à mettre leurs envahisseurs en déroute mais le cours de la troisième bataille devait leur être défavorable. Jack Vance introduit alors l'étrange trio de sorcières unijambistes Cush, Gadish et Fèhor. On retrouve encore cette étrange particularité du membre unique. Faut-il y voir une sorte de mutilation imposée aux praticiens pour éviter qu'ils ne s'enfuient ?  Quoiqu'il en soit, ce sont ces trois fomoriennes de l'Art qui font pencher la balance en faveur de leur camp.
    Une victoire certes, mais rien de glorieux. Même le roi des fomoriens, Connan, gît sur le champ de bataille.
    Magnanimes ou épuisés, les Fomoriens offrent alors 1 an et 1 jour aux rescapés Némédiens pour décamper et mettre les voiles. Grand générosité de leur part puisqu'il reste à peu près 30 hommes en face (Vance 85, Brasey 07). A peine de quoi remplir deux petits navires. Pourquoi deux petits au lieu d'un normal ? Car pour couronner le tout, ils ne sont pas d'accord entre eux. Deux chefs se distinguent, Starn et Fergus, tous deux fils de Nemed et persuadés d'incarner un nouvel espoir. Les Fomoriens peuvent se frotter les mains, ils n'auront pas besoin de finir le boulot. Et comme la nature est bien faite, les Némédiens rescapés se partagent en deux groupes de 15, ce qui leur donne des chances équivalentes.

    Les Fomoriens

    5- Les Fomoriens (bouh !)


    Les redoutables géants restent donc en Irlande et les îles alentour tandis que les vaincus se séparent en deux branches. L'une se dirige vers une lointaine terre du septentrion, sans doute la légendaire Hyperborée (l'Islande ?).
    L'autre faction prend le large vers le ponant, par l'Armorique puis plus loin encore jusqu'en Thrace. Ceux là n'auront pas de chance, ils seront exploités sans vergogne par les locaux.
    C'est ainsi que se termine la troisième invasion de l'Irlande. Une période de stabilité s'intercale.

    La suite : Les Hommes-Foudre
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  • Quelques générations plus tard, de nouvelles voiles s'invitent dans le paisible horizon de l'Irlande. Lorsque leurs vaisseaux touchent terre, les hommes qui en descendent se décrivent comme des anciens esclaves grecs ayant échappé à leur dur labeur.
    Asservis par les Thraces, ils devaient rendre les terres fertiles en transportant de la terre dans des sacs. Et pour cause, on les nommait "hommes aux sacs", ce qui se traduit en celte par "Fir Bolgs". Curieusement, ce même patronyme signifie également "hommes-foudre", une particularité que l'on peut assimiler à la grande habileté des Fir Bolgs dans la forge d'armes et d'outils. D'après Edouard Brasey, ils avaient la peau sombre, une carrure de colosse et un faciès simiesque. Les descendants des Némédiens sont de retour mais l'Histoire ne leur rend pas tellement hommage.

    Les Fir Bolgs

    6- ...N'est ce pas ?

    Pour commencer, on ne sait trop au juste quelles sont leurs relations avec les Fomoriens mais ils ne semble pas y avoir de bataille mémorable à porter au registre. D'après l'ouvrage dirigé par Roy Willis intitulé Mythologies du Monde, les Fir Bolgs imposent leur souveraineté sur l'intégralité de l'île, repoussant donc sans doute les Fomoriens dans leurs îles brumeuses qui constituaient le véritable siège de leur puissance.
    Une autre version propose une cohabitation fragile entre les deux peuples (Van Tulleken 85). C'est d'ailleurs la seule source où il est fait mention des Fomoriens. Les autres récits semblent les avoir tout bonnement occultés.

    Les Fir Bolgs colonisent tout de même toute l'Irlande sous l'impulsion de cinq chefs. Ils fondent ainsi des provinces aux quatre points cardinaux : l'Ulster, le Leinster, le Connacht, le Munster ainsi que le Meast au centre. La royauté s'établit et un nouvel ordre social voit le jour. On peut dire que c'est la première fois que l'Irlande connaît une véritable civilisation juste, prospère et épanouie.

    Malgré ces apports considérables, les Fir Bolgs demeurent méconnus et passent pour des lourdauds. Du coup, la seconde invasion de l'Irlande est beaucoup moins croustillante. Peu de héros, peu de batailles et donc peu de matière à raconter. Il faut croire que les périodes paisibles ne plaisent pas. Passons donc directement à la baston suivante, qui sera bien plus juteuse et mémorable.

    La suite : Les Tuathas dé Danann
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  • 37 ans plus tard, il y a du nouveau sous soleil, ou plutôt sous les nuages. Ils arrivent dans le brouillard depuis une lointaine terre du septentrion dont personne n'a jamais entendu parler (nous revoilà à parler de l'Hyperborée). Ils sont beaux, ils sont forts et en plus, ils sont bénis par la déesse-mère Dana qui leur confère la jeunesse éternelle.

    Tuathas

    7- L'arrivée brumeuse des Danéens


    Les Tuathas dé Danann incarnent le renouveau vibrant de passion et de magie. Ce sont eux, qui ont marqué les légendes d'une emprunte profonde, donnant naissance à de nombreux mythes sur les elfes et les fées. Ce sont eux les véritables gagnants. A ce stade, on se doute que ça va mal tourner pour les Fir Bolgs.

    Les descendants de la seconde faction des Némédiens exigent d'emblée la moitié des terres (Van Tulleken 85), sans doute comme héritage légitime. Une prétention qui leur est bien entendue refusée. Les armes sont tirées.
    Deux armées imposantes se rencontrent dans la plaine de Mag Tuired, la "plaine aux piliers". Les Tuathas emmenés par Nuada infligent de lourdes pertes à leurs ennemis qui donnent dans la résistance acharnée et désespérée. Les combats atteignent alors leur apogée lorsque les deux champions de chaque camp se lancent dans un duel acharné.

    Sreng

    8- Sreng...ça va saigner !


    Nuada perd son bras droit mais il est encore capable de vaincre le favori des Fir Bolgs, Sreng. Les Fir Bolgs sont défaits et à tout jamais biffés du Grand Livre. On n'entend plus jamais parler d'eux à partir de cette bataille, si ce n'est dans les légendes.

    Et c'est à ce moment béni qui les Fomoriens réapparaissent. "On vous a manqué ?". C'est une des étrangetés de l'Histoire, les Fir Bolgs avaient été capable de les contenir, mais les Tuathas sont contraints de se soumettre aux exigences de ce peuple primordial.
    C'est à cette époque que les descriptions se font de moins en moins flatteuses pour les Fomoriens. Le Bestiaire Magique de la série des Mondes Enchantés dirigée par Van Tulleken parle de créatures dégénérées aux formes variées, allant du poisson marcheur au nourrisson rougeâtre, en passant par des spécimens hybrides et repoussants. Les fomoriens se laissaient aller à une décadence qui les entraînait à tous les excès, y compris des pratiques sexuelles contre-nature.

    Fomoriens

    9- Les Fomoriens pervertis


    Et pourtant il s'en trouvait dont la beauté irréelle subjuguait les hommes. Et il arrivait qu'à l'occasion, un Tuatha se compromette avec une Fomorienne. Ainsi, les sangs des deux peuples se sont mélangés à plusieurs reprises.
    Amputé de son bras droit, le chef des Tuathas, Nuada, n'a plus le droit de régner, la cohésion du royaume dépendant directement de l'intégrité physique du roi. Il cède donc son trône à Eochaid Bress, qui se trouve justement être le fruit d'une union croisée entre Eriu et Elatha, une Danéenne et un prince fomorien (Brasey 07). Cela peut sembler étrange vis-à-vis de la succession des évènements. Il faut en déduire que les Fomoriens et les Tuathas étaient en contact, voire même alliés bien avant que les Danéens ne remettent un pied en Irlande. Des unions de ce type ont donc largement eu l'occasion de se produire avant la première bataille de Mag Tuired. Cette explication fournit également un éclaircissement quand au retour étrange des Fomoriens sur le devant de la scène.

    Gress

    10 - La légende dit que l'on comparait les belles choses à Eochaid Gress pour les mettre en valeur. (d'ailleurs, ne dit-on pas "beau comme Gress ?"...ah non tiens)


    Quoiqu'il en soit, Gress n'est pas un bon monarque. Il étrangle son peuple à coups d'impôts et de taxes. Très impopulaire, il se met à dos les bardes et conteurs, dont le célèbre Coipre (Willis 93). A cette époque les ménestrels ont un statut très particulier. Garants de la renommée des hommes illustres, ils sont tout aussi capables de démolir ou de hisser quelqu'un sur un pied d'estale. Etre la cible d'un barde n'est jamais une bonne chose. Les croyances populaires leur prêtaient même des pouvoirs magiques considérables et il est fréquent de voir des dieux magiciens affublés d'une harpe.
    A force de railleries, Gress est contraint de s'enfuir auprès des siens, dans les îles avoisinantes. Le chef des Fomoriens, le redoutable cyclope Balor, ne goûte pas du tout le sel de la plaisanterie et entreprend alors d'amasser une gigantesque armée pour écraser les Tuathas fantasques. Qu'à cela ne tienne, ils font pareil de l'autre coté.

    Les meneurs des Tuathas dé Danann se trouvent être Dagda, le druide, Ogme le guerrier et Nuada, le roi. Ce dernier se fait greffer un bras en argent par Miach, le fils du dieu guérisseur Diancecht (Brasey 07) et retrouve ainsi la capacité royale.
    A peine réinstallé sur le trône, il reçoit la visite d'un étrange individu qui s'annonce comme Lugh, fils de Delbaeth (un Tuatha) et Eri (une Fomorienne). Mais surtout, petit-fils de Balor.
    Les cycles mythologiques se recoupent et de la même manière que Zeus a réchappé à Chronos pour mieux lui botter le derrière, Lugh a été sauvé à sa naissance par Eri. Une prophétie prédisait que Balor serait défait par son petit fils, une éventualité qu'il a tenté de contrecarrer en les tuant tous, à l'image de ses homologues scandinave (Ymir) et grec (Chronos) se trouvant dans une situation similaire. Ironie du sort, c'est sans doute cette attention toute paternelle qui provoque ensuite la vengeance mortelle de leurs rejetons, c'est assez logique.

    Impressionné par les talents multiples de Lugh, Nuada-au-Bras-d'Argent va jusqu'à lui céder ce fameux trône qu'il vient de récupérer pour la durée du conflit. C'est dire s'il en jette ! Le héros prend alors les choses en main et prépare ses troupes à la seconde bataille de Mag Tuired.
    La veille de l'affrontement, on raconte que la déesse de la mort, Morrighan, serait venue en personne accorder sa bénédiction à Dagda, Ogme et Lugh.

    Nuada

    11- Nuada-au-bras-d'Argent. L'image du Roi par excellence.


    La rencontre à lieu à nouveau lors de la fête de Samhain. Etrangement, Lugh manque à l'appel. En revanche les autres champions sont de la partie. Dagda manie un gourdin qui massacre d'un coté et ressuscite de l'autre. Il est également en possession d'un chaudron d'abondance pour nourrir et guérir les troupes. Ogme trucide tout ce qui passe à sa portée avec une maestria hors du commun. Nuada quand à lui possède une épée magique que nul ne peut esquiver. Et pourtant le combat est mal engagé. La magie des fomoriens combinée à leur ardeur guerrière semble prendre le pas sur la fougue des Tuathas.

    Où donc est passé le maître de tous les talents ? Celui qui doit mener les Tuathas à la victoire ? Sans oublier la fameuse prophétie qui doit s'accomplir et causer la perte de Balor.

    En réalité, Nuada a fait emprisonner Lugh peu de temps avant le début de la bataille, enserrant son corps sous de lourdes chaînes pour qu'il ne risque pas sa peau. Elément indispensable, il ne s'agirait pas qu'il meure pendant l'empoignade. On peut évidement voir cet acte sous un autre angle : Nuada relégué en arrière plan a très bien pu développer une forme de jalousie perverse. Il faut admettre que Lugh a tout pour être haïssable : beau, sympathique,  intelligent et maître dans tous les arts. A notre échelle, il incarne le premier de la classe dont tout le monde a voulu la peau à un moment dans sa vie. Que sont les capacités et espoirs d'un humain ordinaire à coté de cette perfection ?

    Alors ce serait plutôt pour ravir un peu de gloire que Nuada écarte volontairement Lugh de la scène (Fernand Comte, 1999). On note qu'il n'a pas reçu la bénédiction de Morrighan comme les trois autres, peut-être une forme de châtiment divin. En tout cas, privé de la grâce de la déesse de la mort, il trépasse sous les assauts de Balor-aux-Coups-Puissants.
    Le roi est mort, c'est un coup dur pour les armées danéennes. Mais le si doué Lugh est également expert en évasion et ne tarde pas à se libérer pour rejoindre la mêlée.

    Mag Tuired 2

    12- On ne peut pas dire que les Fomoriens soient à leur avantage là


    Le cours de la bataille change rapidement et le petit fils peut enfin défier son aïeul. Celui-ci possède un pouvoir si puissant qu'il lui suffit d'un seul regard pour dessécher toute forme de vie. Cela dit, pour éviter de semer la mort inconsidérément, il garde sa paupière scellée par un anneau, lequel est manœuvré par des assistants. Seulement, au moment où il fait relever sa paupière unique pour détruire son petit-batard, Lugh plus leste parvient à lui expédier un javelot qui lui traverse le crâne et poursuit sa course à travers les rangs ennemis massés derrière leur chef. Sous l'impact, des éclats du globe oculaire voltigent dans le sillage du javelot, semant un désastre chez les Fomoriens. Ces derniers se font alors littéralement écharper et peu d'entre eux survivent. Les Tuathas dé Danann sont finalement victorieux.

    C'en est définitivement terminé de la tyrannie séculaire des Fomoriens. Les quelques rescapés (quatre, d'après la légende) sont emmenés dans des terres lointaines par des princes Tuathas où l'on perd leur trace. Quand aux Tuathas, victorieux aux deux batailles de Mag Tuired, ils disposent à présent de toute l'Irlande en récompense de leurs exploits…jusqu'à l'arrivée des envahisseurs suivants.

    La suite : Les Soldats Espagnols
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  • L'Europe est une contrée mouvementée. C'est ainsi qu'un peuple celte remontant d'Espagne se retrouve un jour à son tour en vue des côtes irlandaises. En latin, soldats espagnols se dit Miles Hispaniae, ce qui a ensuite donné leur nom par contraction : Mil Espaine, puis Milésiens.

    Ils débarquent le jour de la fête de Beltaine, un premier mai et affrontent les Tuathas lors de la bataille de Tailtiu (Telltown). A cette époque, le roi des Tuathas est Dagda, le druide-barde. Vaincus, les Tuathas concluent un accord avec les Milésiens pour se partager les terres.
    Les vainqueurs gardent bien entendu la part du lion tandis que les Tuathas doivent se retirer dans les sous-sols et collines du nord.
    A partir de là, ils acquièrent le nom de "Siths", soit "peuple des collines" et entrent définitivement dans le folklore irlandais sous la forme d'esprits magiques, d'elfes et d'entités éthérées.

    Le petit peuple des fées, est largement issu des Tuathas dé Danann, lesquels sont toujours réputés pour leur noblesse, leur sagesse et leur savoir. A tel point que les Milésiens viennent souvent demander conseil à ces "hauts elfes".
    Vivant reclus, ils deviennent néanmoins de moins en moins visibles, comme s'ils avaient atteint un autre monde. La tradition populaire veut que leurs tertres s'ouvrent une fois par an, lors de la veille de la fête de Samhain, la bien connue Halloween (All Hallow's Even).

    Faeries

    13 - la Faërie de notre monde de brute


    Les grands héros Tuathas sont pour la plupart passés dans le panthéon de la mythologie celtique. On trouve ainsi Lugh-à-la-longue-main en tête, désigné comme le "salminadach", c'est-à-dire le "polytechnicien", il n'a aucun attribut ou fonction spécifique puisqu'il les assume tous. Le Dagda quand à lui, devient le dieu des druides et le père-de-tous. Il est représenté en général avec une massue, une roue à rayons, un chaudron et une lyre.

    Les milésiens sont ensuite devenus le premier peuple Gaël qui est réputé pour avoir colonisé l'Irlande au IVième de notre ère. Les romains n'ayant jamais tenté de conquérir l'île verte, ils ont pu développer leur religion, leur système politique et leur langue (une des langues gaéliques) pendant plus de 800 ans.

    La suite : Conclusionation
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  • Les récits et les batailles de l'Irlande sont loin d'être terminées mais c'est ici que la véritable Histoire commence à affirmer ses prétentions et que les brumes fantastiques doivent se retirer dans les sous-bois. C'est aussi ici que j'arrête mon petit exposé.

    Mag Tuired

    14 - La première bataille de Mag Tuired


    Il y a sans doute beaucoup de détails à inspecter de plus près. J'ai déniché pas mal de matière sur les Tuathas dé Danann qui remportent la palme du charisme mais il est plus difficile de se renseigner sur leurs adversaires. Il serait assez intéressant de savoir quelles étaient les relations entre les Fir Bolgs et les Fomoriens avant la 5ième invasion. De même qu'il serait sans doute assez édifiant de se pencher sur une possible alliance préalable entre les Danéens et les Fomoriens. L'histoire en prendrait un autre éclairage si les Tuathas ne s'étaient pas rebellés contre un oppresseur tyrannique mais plutôt retournés contre leur allié de la première heure. Ce n'est qu'une hypothèse bien sûr, mais j'aime ce genre de tournures et c'est souvent ainsi que les choses se passent.
    Même sur la verte Erin, l'herbe doit paraître plus belle chez le voisin, alors on commence par trouver des arrangements jusqu'au moment où l'on est assez fort pour imposer ses vues.
    Il y a également un autre point que je me sens obligé d'éclaircir à ce stade. Dans mes sources, le lecteur curieux trouvera une référence à Jack Vance, lequel est un auteur reconnu. Je ne me suis pas appuyé sur ses romans pour tirer des informations (bien que ce serait sans doute possible), mais sur les annexes qu'il propose à la fin de ses volumes sur le Cycle de Lyonnesse. Malgré le manque de citations bibliographiques, je suis convaincu que ces écrits ont été élaborés à partir de sources et non uniquement sur la base de l'imaginaire. Jack Vance est cependant le seul auteur à traiter des Iles Anciennes. Un territoire imaginaire qui abritait entre autres, la ville mythique d'Avalon.

    iles anciennes

    15- Les Iles Anciennes...et pourquoi pas ?


    A ce titre, la plupart des évènements décrits au cours de cet article trouvent une version différente chez lui. Ainsi, les Fomoriens seraient originaires de cette contrée. De même, le premier fils de Nemed, Starn aurait conduit sa troupe au nord des Iles anciennes, pour fonder le Skaghane, reprenant également le nom de Ska. Les Tuathas ne seraient pas leurs descendants, mais une peuplade venue d'Asie Mineure…un peu comme les Fir Bolgs finalement.
    Bref, les déviances sont nombreuses mais comme il est le seul à en parler, j'en ai rarement fait état.

    Enfin, au niveau des dates, j'ai beaucoup de mal à situer cette série d'invasion dans le temps. Il est possible que les références soient situées dans les ouvrages originaux de Lebor Gabála Érenn et Caith Maige Tureedh, mais comme je ne les ai pas lus… Pour ma part, ce folklore gardera donc une part de rêve avec cette fameuse locution : "il était une fois...".

    Le Rocher des Fées

    16 - Le Rocher des Fées (Alsace)


    La suite : Bibliographie et Imagerie
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  • Ouvrages :

    - Brasey Edouard, La Petite Encyclopédie de Merveilleux, le Pré au Clerc 2007.
    - Comte Fernand, Les Grandes Figures de la Mythologie, Le Club 1999.
    - Vance Jack, le Jardin de Suldrun (Annexes), Gallimard 1983.
    - Van Tulleken Kit, Bestiaire Magique, Collection Les Mondes Enchantés Time Life 1985.
    - Willis Roy et al., Mythologies du Monde, Evergreen 1993.

    Sites :

    - The Second Battle of Mag Tuired, Celtic Litterature Collective.
    - La prima battaglia di Mag Tuired
    - Et un brin de wikipédia…

    Images :

    1, 4 : Les Bourlingueurs
    2, 9, 12 : Scans tirés du
    Bestiaire Magique
    3 : Scan tiré de Mythologies du Monde
    5, 6 : Social Fays
    7, 8, 10, 11 et 14 : Magnifiques illustrations de Jim Fitzpatrick
    13 : World Mystery : Faeries
    15 : Scan tiré du Jardin de Suldrun.
    16 : Photo personnelle d'Alsace. (Il en fallait bien une !)


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